Jean-François-Émile Gueymard (1788-1869)


Emile Gueymard nait à Corps (Isère) le 28 février 1788. On doit à F. Raoult dans l’éloge rendu à son prédécesseur en 1897, alors qu’il est doyen de la Faculté des sciences de Grenoble, des détails concernant la jeunesse d’Emile Gueymard. Il est membre d’une fratrie de six enfants. Son père, Jean-Charles, est Maire de la commune de Corps à partir de 1794. Deux des enfants Gueymard présentant des prédispositions aux études sont envoyés sur Grenoble. Mais les ressources paternelles étant limitées, les premières années dans la capitale des Alpes se révèlent pour les deux frères compliquées. Ils louent une petite chambre au-dessus du four d’un boulanger, profitant ainsi d’un chauffage gratuit pendant l’hiver. L’étroitesse du lit ne les autorise pas à pouvoir dormir en même temps. Ils se relayent donc, pendant que l’un travaille, l’autre dort.

Le frère d’Emile, Victor-Auguste Gueymard réussira dans sa voie. Il deviendra avocat, plusieurs fois bâtonnier de l’Ordre, professeur et doyen à la faculté de Droit de Grenoble.

Quant à Emile, il tente l’examen d’entrée à l’Ecole polytechnique en 1806. Il a alors 18 ans, il est reçu premier. Deux ans plus tard, il entre à l’Ecole des mines et est nommé à l’âge de 22 ans ingénieur de 2ème classe.

Pendant dix ans, il est missionné pour explorer les richesses minéralogiques du Simplon et du Léman. Il parcourt alors ce territoire en tous sens, visitant mines et usines, analysant les eaux et les roches. Il recueille des échantillons et prend des notes qu’il rassemblera par la suite sous la forme d’un mémoire sur la minéralogie et la géologie du Simplon. En 1814, il se marie avec Hélène Frier ; leur fils Eugène naîtra de cette union en 1815.

En 1820, ses travaux ayant été remarqués par ses supérieurs, il est détaché en mission extraordinaire et envoyé en Corse. Le département a une très mauvaise réputation, les «montagnards » y sont imaginés encore comme à l’état sauvage et les voies de communication mal commodes lorsqu’elles ne sont pas inexistantes sont qualifiées de peu sûres. Mais E. Gueymard fait fi de ces a priori : «arrivé dans l’île je déposai sur le rivage les préjugés avec lesquels j’étais parti ; et dégagé de toute espèce de prévention, je vis la Corse et ses habitants. J’ai parcouru pendant cinq mois toutes les montagnes, les vallons, les plaines, les villes, les villages et hameaux…». Tout en ayant contracté la malaria, il mènera à bien sa mission.

1824 est une grande année pour E. Gueymard : il est nommé ingénieur des mines du 14ème arrondissement avec résidence à Grenoble. Ne voulant pas quitter le Dauphiné, ce poste comble ses espérances : « Habiter la terre qui donna naissance aux Dolomieu, aux Condillac, aux Mably et à la Liberté, était à mes yeux le plus grand succès que je pusse obtenir. J’étais appelé à parcourir la terre promise de la minéralogie, cette terre classique, saluée par tous les savants de l’Europe. Un vaste champ se présentait devant moi, et je l’abordai avec le feu sacré de l’amour de la science ». En parallèle il obtient la chaire nouvellement créée d’histoire naturelle à la Faculté des Sciences de Grenoble. Ne pouvant concevoir d’exercer ses fonctions sans le concours de la chimie, il fonde un laboratoire d’essais et d’analyses chimiques. Il en assure bénévolement la direction et s’engage à fournir gratuitement toutes les analyses et les essais qui lui seraient demandés, à charge pour le Conseil général de lui fournir un crédit pour les réactifs (qui seront d’ailleurs purifiés par E. Gueymard pour une meilleure efficacité). Son premier souci se tourne vers l’eau potable. Ayant constaté l’insalubrité des eaux de puits, il sélectionne des eaux de source et les moyens de les amener dans la commune. En 1826, les travaux sont terminés et la population de Grenoble est pour la première fois dotée en eau potable. Huit autres villes dont Nîmes et Chambéry le sollicitèront par la suite pour effectuer des travaux similaires.

C’est le début d’une longue série d’études d’ingénierie qui le conduisent à s’occuper de métallurgie du fer, de pénétration et conservation des bois, de silicatisation des pierres, d’écobuage, de soufrage de la vigne, de la composition et des choix des amendements et des engrais, des assolements, du drainage, de regazonnement, sans oublier l’industrie des chaux hydrauliques et ciments qui le lie d’amitié avec Louis Joseph Vicat, l’inventeur du ciment. Ses travaux lui valent de recevoir le grade de commandeur de la Légion d’honneur en 1865.

Une vie bien remplie où toujours, comme en toile de fonds, la minéralogie n’est jamais très loin. Sa collection de minéralogie, complétée tout au long de sa vie, en témoigne ainsi que son ouvrage en deux volumes sur la Statistique minéralogique, géologique, métallurgique et minéralogique du département de l’Isère publiée en 1844.

Mis à la retraite en 1849, sa succession est assurée par Charles Lory, son élève depuis 1844. Doyen de la Faculté, il reste à la direction du laboratoire d’analyse qu’il a créé jusqu’à sa mort en 1869.

Collections présentes au Muséum de Grenoble :
Collection de minéralogie et de pétrographie

Publications :
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Pour en savoir plus :
Vers le site www.annales.org